La Sûreté du Québec enquête sur le Journal de Québec
13 juillet 2007
(MNQ) – La Sûreté du Québec a ouvert une
enquête criminelle sur la publication de lidentité dune victime
dagression sexuelle dans le Journal de Québec et sur le site
Internet Canoë, ce qui
était pourtant interdit par le tribunal.
Munis dun mandat de perquisition, deux enquêteurs du Bureau
régional denquête de la SQ se sont rendus aux locaux du quotidien
de Vanier, mercredi après-midi. «Nos enquêteurs voulaient obtenir des
documents et rencontrer les responsables du journal, de même que le
journaliste qui a écrit larticle en question», a précisé
lagent Richard Gagné, porte-parole de la SQ à Québec. Lagent
Gagné a affirmé que le corps policier a été saisi dune plainte, en
début de semaine, au sujet dun article publié dans la livraison du
Journal de Québec de
vendredi. On y relatait la sentence de 15 mois demprisonnement à
purger dans la collectivité imposée par le juge Carol St-Cyr à
Pier-Olivier Boulet, 22 ans, un militaire de la base de Valcartier
trouvé coupable dagression sexuelle sur une jeune femme de 18 ans.
Victime
identifiée, journaliste anonyme
La victime a vu son nom publié en toutes lettres dans cet article,
en dépit dune ordonnance de non-publication rendue par le tribunal
afin dassurer que le public nen soit pas informé par les médias.
Dans toutes les causes dagression sexuelle, la Couronne demande et
obtient systématiquement du tribunal pareille ordonnance en vertu
de larticle 486.4 du Code criminel. Cela, que la victime soit
mineure ou majeure. Par contre, lauteur de larticle litigieux
nétait pas identifié. Le texte était simplement signé «Canoë et PC». Les nouvelles (à
lexception des chroniques) publiées dans le Journal ne sont pas coiffées de la
signature des journalistes depuis le lock-out déclenché à ce
quotidien propriété de Quebecor. La nouvelle a aussi été diffusée
sur le portail Canoë, dès
jeudi soir. Les responsables du site Web lont cependant retirée,
vendredi avant-midi, après un appel téléphonique provenant du
bureau des procureurs de la Couronne à Québec les sommant de
corriger cette bourde. «Cest un
volet que les enquêteurs entendent aussi vérifier», a
affirmé lagent Gagné. Selon ce quil a été possible dapprendre,
la victime était dans tous ses états lorsquelle a constaté que son
identité avait ainsi été dévoilée au grand public. Elle a vite
communiqué avec la Couronne pour se plaindre, ayant été reconnue
non seulement dans son milieu de travail, mais par certains membres
de sa famille qui ignoraient tout des procédures judiciaires dans
lesquelles elle était engagée. Une fois quil sera terminé, la
Sûreté du Québec remettra son rapport denquête au cours des
prochaines semaines à la Couronne, où un procureur déterminera sil
y a lieu de déposer ou non une accusation criminelle contre le
journaliste, celle davoir transgressé une ordonnance dun
tribunal. «Cest un type
denquête qui sort de lordinaire, mais ça (le non-respect
dune ordonnance de non-publication) sest déjà fait dans le passé et pas toujours
par des médias», daprès lagent Gagné.
Les syndiqués inquiets
«Un jour, nous retournerons
travailler au Journal de Québec, mais sa crédibilité risque alors dêtre très
entachée.» Daniel Paquet, porte-parole des trois syndicats
touchés par le conflit de travail au Journal de Québec (les employés de la
rédaction et des bureaux, en lock-out, et ceux de limprimerie, en
grève), sest dit inquiet des répercussions de cette affaire sur la
crédibilité du quotidien. «Les
artisans et les professionnels de linformation du Journal
ne sont plus là et lon constate
que des erreurs se sont multipliées ces dernières semaines. Ils ont
annoncé par erreur la mort de lex-hockeyeur du Canadien John
Ferguson, ils ont publié que le lac Saint-Joseph était infesté
dalgues bleues, ils ont inversé des noms et des photos dans les
avis de décès. Là, lerreur semble encore plus grave, puisquelle
entraîne une enquête de la SQ. Cest inquiétant.» Dans ces
circonstances, Daniel Paquet estime que «plus tôt quon retournera à la table des
négociations avec lemployeur pour en venir à une entente, mieux ce
sera.»