Le Journal de Québec et Canoë condamnés
19 juin 2008
(MMQ et SCFP) Mardi, le Journal de Québec et Canoë ont été
condamnés à payer des amendes totalisant 23,000$, après avoir
plaidé coupables à une accusation davoir transgressé une
ordonnance de non-publication du tribunal en divulguant lidentité
dune victime dagression sexuelle.
Le journaliste Hubert Lapointe, employé du site Web Canoë, a
également reconnu sa culpabilité à la même accusation, mais
contrairement aux deux entreprises, il sen tire avec une
absolution inconditionnelle, ce qui lui évitera un casier
judiciaire. Pour bénéficier de la clémence du tribunal, il sest
engagé à verser un don de 10,000$, dici le 10 juillet, à un
organisme daide aux jeunes défavorisés de la basse-ville, Le
Pignon Bleu.
Une bourde qui coûte cher
En échange des plaidoyers de culpabilité de ses trois coaccusés, la
poursuite a demandé que lon prononce larrêt des procédures contre
Quebecor Média, sur laquelle pesait la même accusation. Son
quotidien et son site Internet ont chacun écopé une amende de
10,000$, à laquelle sajoute une suramende représentant 15% de la
note, a tranché le juge Pierre Verdon.
Cest sans compter sur le dédommagement – dont
le montant est confidentiel – que le Journal de Québec (Corporation Sun
Media) et Canoë ont déjà versé à la victime en vertu dune entente
hors cour survenue entre les parties, selon ce quont déclaré les
avocates de la poursuite et de la défense.
De nouvelles accusations!
Aussitôt condamnés, le Journal de
Québec et Canoë se retrouvent de nouveau accusés de la même
infraction criminelle, cette fois à la suite darticles rédigés par
le journaliste Bernard Plante.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales a déposé trois
chefs daccusation contre Bernard Plante, un employé de lagence
Nomade dont les textes alimentent le site Web Canoë, ainsi que les
pages du Journal de Québec
depuis que la direction du quotidien a mis ses employés de la
rédaction en lock-out, il y a presque 14 mois. Tout comme Lapointe,
Plante est aussi visé par les plaintes syndicales en vertu des
dispositions anti-scabs.
Bernard Plante, journaliste âgé de 52 ans, est inculpé davoir omis
de se conformer à une ordonnance de non-publication rendue par le
tribunal, et ce, à trois reprises, soit le 3 avril, le 30 avril et
le 6 mai 2008, selon les plaintes autorisées par Me Lyne Morais,
procureure de la poursuite.
On lui reproche davoir rédigé des articles rapportant en détails
des éléments de preuve divulgués au palais de justice de Québec
lors des enquêtes sur remise en liberté de Jacques Vachon (inculpé
dagressions sexuelles), le 3 avril dernier, et de Yvan Paré
(accusé de conduite en état débriété causant un décès), le 30
avril. Ces informations étaient frappées dordonnances de
non-publication rendues par les juges ayant présidé ces deux
enquêtes sur remise en liberté.
Puis, le 6 mai, à la suite du retour devant le tribunal de Vachon
pour lorientation de son dossier, le journaliste aurait outrepassé
une seconde fois lordonnance touchant la preuve recueillie par les
policiers à lendroit du présumé agresseur, avec un article
reprenant certains de ses écrits du 3 avril.
La Sûreté du Québec a été saisie de laffaire et deux membres de
son Bureau régional denquête de la SQ ont notamment rencontré
Bernard Plante, deux jours après sa dernière infraction alléguée.
Le journaliste, qui a déjà assuré la couverture de la colline
parlementaire pour un réseau de télé, doit comparaître face à ces
accusations le 3 juillet prochain, au palais de justice de Québec.
Une récidive coûterait
cher…
Quebecor Media, son quotidien Le
Journal de Québec (Corporation Sun Media) et son site
Internet Canoë comparaîtront à la même date pour répondre à une
accusation davoir omis de se conformer à une ordonnance du
tribunal.
Si leur culpabilité devait être établie, il sagirait dune
récidive pour Le Journal de
Québec et Canoë, ce qui les rendrait passibles damendes
encore plus élevées que celles auxquelles ces médias ont été
condamnés (10,000$ chacun, en plus de suramendes administratives de
15% sur ces montants), il y a quelques jours. Le juge Pierre Verdon
avait alors dit croire que ces amendes auraient «un effet dissuasif» sur les
entreprises visées, qui navaient pas de casier judiciaire
auparavant.
En vertu du Code criminel, lamende maximale pour une entreprise
trouvée coupable de cette infraction sélève à 100,000$. Quant à un
journaliste, la peine maximale prévue par le Code criminel est une
amende de 2000$ ou six mois de prison. Il faut comprendre que les
peines maximales ne sappliquent cependant «quaux pires criminels, pour les pires
crimes, dans les pires circonstances», selon Me Morais.
Mardi, le quotidien et le site Web de Quebecor ont plaidé coupable
à une accusation davoir transgressé une ordonnance du tribunal en
publiant lidentité dune victime dagression sexuelle dans un
article du journaliste Hubert Lapointe, en juillet dernier. Employé
de Canoë, Lapointe, 26 ans, a pu bénéficier dune absolution
inconditionnelle, en échange dun don de 10,000$ à un organisme de
bienfaisance de Québec, tandis quun arrêt des procédures a été
prononcé à lendroit de Quebecor Media.
Si la procureure de la poursuite ne sest pas opposée à ce que la
défense demande labsolution du journaliste Lapointe en raison de
son inexpérience, Me Morais a cependant tenu à préciser, mardi,
devant le juge Verdon, que sa position «aurait été différente si laccusé avait été
un journaliste aguerri».
Toujours «pas pertinent»?
«Le rédacteur en chef du
Journal de Québec, Serge
Gosselin, et le directeur de linformation, Donald Charette, ont
témoigné devant la Commission des relations du travail quils ne
savaient pas qui écrit présentement dans le Journal. M. Gosselin a
même ajouté que ce nétait pas pertinent de le savoir! Ils
devraient commencer à se poser des questions…»
Le porte-parole des syndiqués du Journal de Québec, Denis Bolduc, a
réagi en ces termes au dépôt de nouvelles accusations en matière
criminelle contre le Journal. Il a qualifié la situation de
«pitoyable».
«Le Journal de Québec
est en train de devenir la risée
de tous les quotidiens au Québec. Depuis le début du conflit de
travail, soit bientôt 14 mois, la qualité du Journal est atteinte
chaque jour. Pas surprenant, dans ces circonstances, que le tirage
du Journal soit maintenant
sur la pente descendante», a-t-il fait valoir.
Bernard Plante et Hubert Lapointe comptent parmi les 17
journalistes et photographes qui sont visés, devant la Commission
des relations du travail, par une plainte des syndiqués en conflit
de travail du Journal de
Québec, étant soupçonnés dagir illégalement comme briseurs
de grève. La commissaire Myriam Bédard doit rendre sa décision
prochainement.